Un jour peut être que je t'aimerais.
« - Dis Shiro, dis le que tu m'aimes... Vas y, dis le moi.
- Je t'aime...
- Dis le encore, dis le plus fort, allez Shiro. Tu m'aimes ? Dis le moi, encore...
- Je... t'aime... »
Une larme coula, un sourire se dessina sur le visage livide, les paupières se fermèrent et les poumons, dans un dernier souffle, se vidèrent. Un garçon, un tout petit garçon pleurait silencieusement sur le corps sans vie, déversant toute sa rage, tout son désespoir sur les vêtements blancs que portaient le cadavre. Le silence, un silence de mort, régnait dans la pièce. De la fenêtre entrouverte, une brise fraîche sembla venir cueillir l'âme du décédé pour l'emmener plus loin, dans un monde plus beau... Ou peut être pire. Le petit frémit et pleurnicha encore sur le corps sans vie, comme s'il espérait que ses pleurs ramèneraient la vie. La porte s'ouvrit dans un grincement sinistre, un homme grand et imposant apparut dans l'encadrement.
« - Shirogane ?
- Qui êtes vous...
- Je suis là pour m'occuper de toi.
- Vous êtes un ami de grand-frère..?
- ... C'est à peu près ça. »
Le petit se laissa faire, comme apaisé par les paroles de l'inconnu. Un ami de grand frère ? Tout ira bien alors... Si tu savais, Shirogane, si seulement tu savais... Le grand homme souleva le petit argenté, le transportant loin de son grand frère. Dans les bras de l'inconnu, Shiro regardait le corps de sa seule famille par dessus son épaule.
« Adieu, Ryan. Tu seras heureux au près de maman et papa... »
» C h a p t e r O n e ღ
Vis ta vie tant que tu le peux encore
Le soleil jouait à travers les carreaux, ses rayons filtrant, joueurs, dans la pièce pour éloigner l'obscurité qui y régnait. Un nuage était visible de la fenêtre, dans un ciel bleu d'azur. Dans le lit somptueux de la chambre, un petit corps formait une bosse sous les draps blancs, ornés de broderies argentées. La bosse remua légèrement et une petite tête argentée sortit de sous les draps. Les cheveux du jeune garçon, en bataille, lui retombaient devant les yeux. Alors qu'il s'étirait en baillant, la porte massive en bois d'ébène décoré de dorures s'ouvrit doucement, sans un bruit. Un homme grand entra, tiré à quatre épingles. Même ses cheveux bruns et bouclés étaient parfaitement attachés, ne laissant sauvage aucune mèche. Dans une superbe révérence il salua le jeune garçon qui le fixait, les yeux ronds comme des billes et pétillants comme ceux d'un gamin... Ce qu'il était en fin de compte. Il déteignait tout à fait avec le décors, ce petit garçon vêtu de vêtements tombant en lambeaux. Le plus grand homme aux allures de majordome s'avança et tendit la main au plus jeune.
« Bonjour Shirogane. Je suis Alexander et je suis chargé de m'occupé de vous et de votre éducation sur l'ordre du Lord de ces contrées. »
Il parlait d'un anglais parfait que le dénommé Shirogane ne comprenait évidemment pas. Le petit garçon n'avait comprit que son prénom et fixait l'adulte comme si c'était une bête de foire. Un autre homme, plus grand et plus imposant dans son costume blanc entra. Il sourit à Shirogane qui n'eut pas de mal à reconnaître celui qui l'avait cherché le jour de la mort de son frère. Le gamin le fixa longuement, et lui demanda avec ses mots tremblotants et peu sûrs d'eux.
« - Quelle est cette langue qu'il parle sans que je la comprenne ?
- C'est de l'Anglais, Shirogane. Je te l'apprendrais. Voici Alexander, il sera chargé de s'occuper de toi. »
Le gamin fixa Alexander et eut un grand sourire amusé et niais, ce sourire qu'ont les enfants. L'homme en blanc repartit en fermant la porte et le majordome prit le plus jeune dans ses bras, le déshabillant pour aller lui donner son bain.
Lors d'une grande fête organisée par le Lord, quelques années plus tard, la vedette était évidemment ce jeune homme de dix ans qui avait été recueilli par le propriétaire du grand manoir. Shirogane, dans ses beaux vêtements bleus marchait dans les couloirs, courant après son petit chien qui lui avait été offert par Alexander, le majordome qui était chargé de son éducation. Très tôt, le petit avait vouer une véritable passion aux animaux et allait souvent jouer avec les chats qui se promenaient dans l'immense propriété et allait s'occuper du poney de la fille cadette du Lord. Il ne comprenait pas pourquoi ce n'était pas cette fille qui s'en occupait, il ne comprenait pas pourquoi il n'y avait que des hommes dans le manoir alors que le Lord était marié et avait deux filles. Mais lui il s'en fichait, tant qu'il pouvait continuer à apprendre et à jouer avec son chiot, qui voulait pouvait venir. Alors qu'il attrapait son petit chiot dans les bras et se redressa, il entendit des cris, des coups de feu, du remue ménage. Apeuré, il alla se terrer dans sa chambre, se cachant sous les draps en serrant son chiot contre lui.
» C h a p t e r T w o ღ
Mort et désolation, tu ne les as que trop connus
Il ouvre un oeil, puis l'autre. Soudain tout lui revient en mémoire et il se redresse rapidement. Il est est dans son lit. Il fait jour, sûrement vers les neuf heures du matin. Il regarde autour de lui, son regard argenté se promenant dans la pièce. Ouf. Sa chambre est habituelle. Mais les cris d'agonie résonnent toujours dans sa mémoire. Il regarde son chiot blottit dans le coussin, le prend dans ses bras et sort de sa chambre. Le silence est pesant, un silence inhabituel, un silence de mort. Il déglutit difficilement et pousse la grande porte de la salle de réception. Ce qu'il voit le glace sur place. Ses yeux enregistrent la scène sans qu'il puisse seulement imaginer que ce qu'il voyait était la vérité. D'habitude cette salle respirait la beauté et la vie mais en cet instant c'était tout l'inverse. Les murs peints de blanc et de vert pâle étaient tâchés par d'imposantes éclaboussures de sang, le rouge carmin du liquide séché tranchant avec les couleurs douces du mur. Le sol recouvert de carrelage en damier blanc et gris clair était jonché des cadavres des invités. Les tables de buffet étaient renversées, comme si une lutte titanesque avait souffler ces meubles en bois massif. Les plats qui avaient été posés dessus par Alexander avaient voler dans toute la pièce, rajoutant au chaos ambiant. Même le lustre imposant en argent auquel le Lord tenait tant était tombé, éparpillant ses brisures partout. Mais le pire dans tout cela, ce qui attira l'attention du jeune garçon, ce fut le corps d'Alexander qui avait été attaché par les poignets à une lambe murale, trop haute pour lui. Il pendait donc dans le vide, éventré et ses intestins avaient étés découpés. Shirogane approcha comme un automate du corps de son professeur, ami et surtout grand frère de coeur. Il posa son chiot terrifié au sol et son regard d'argent glissa sur tout le corps d'Alexander. Les larmes ne coulaient pas, comme si elles n'osaient pas sortir, de peur de voir ce qu'il s'était produit. Le jeune garçon vit alors le mot écrit sur le sol avec les boyaux du brun : You're Next. Sa connaissance de l'anglais lui permit de les déchiffrer. Un frisson parcourut son échine et le petit roumain se retourna à temps pour voir le Lord chancelant approcher de lui.
« Fuit Shirogane ! Sauve toi ! »
Le petit ne broncha pas et attrapa son chiot avant le regarder une dernière fois Alexander. Il ne put s'empêcher de se dire que même avec les cheveux éparpillés sur son visage, même avec ce teint cadavérique, Alexander était toujours aussi beau. Puis il s'enfuit, disparaissant au moment au le Lord s'écroula après un coup de feu, la balle traversant son crâne d'une tempe à l'autre.
» C h a p t e r T h r e e ღ
La solitude. Encore.
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